Michèle Nken Likeng: Nous voulons amener les gens à prendre conscience de la menace des changements climatiques
La présidente du Réseau eau et climat des organisations de jeunes d’Afrique centrale (Recojac) récapitule sur la discussion autour du rôle des jeunes dans la lutte contre les changements climatiques. Sujet abordé en ouverture de la « Conférence Climate chance Afrique », ce 23 octobre 2023 à l’Institut français de Yaoundé.
Par Cyril Essissima (correspondance particulière)
Vous avez pris part au débat sur le thème : « Transformer nos villes avec la jeunesse ». Quelle problématique revêt une thématique comme celle-là ?
En réalité, il s’agissait de faire un tour en questionnant les scientifiques, les acteurs de la société civile, etc., pour voir quel peut être l’apport des jeunes. Il ressort que la problématique principale est de mettre en avant comment les changements climatiques influencent nos populations, notre communauté et comment les jeunes, même s’ils ne sont pas au sommet de la prise de décisions, peuvent apporter quelque chose. En effet il existe beaucoup d’organisations de jeunes actuellement pour la lutte contre les changements climatiques. Il y a lieu de les capitaliser. C’était un moment de réflexion pour mettre en lumière les difficultés qu’on rencontre lors de la mise en œuvre ces actions et pousser les acteurs à davantage prendre en compte les jeunes comme faisant partie intégrante des solutions. Les solutions ne doivent plus simplement être implémentées par le haut, mais on devrait également les implémenter par le bas à travers l’intégration des acteurs y compris les jeunes.
On a l’impression que les principales villes du Cameroun et d’Afrique subsaharienne en général souffrent des mêmes maux. Faites-vous le même diagnostic ?
La question des changements climatiques est une question globale qui touche tous les pays, fussent-ils développés ou moins développés, car nous partageons la même terre et les mêmes airs. Que ce soit en Afrique subsaharienne ou dans d’autres pays, on vivra les mêmes maux. Sauf que nous ne les vivons pas de la même façon parce qu’il y a une différence de niveau de développement. C’est dire que les populations d’Afrique subsaharienne, donc des pays en voie de développement, vivent dans des conditions de précarité. Le fait est que la façon dont ces populations sont affectées est différente parce que les moyens de lutte sont insuffisants. Lorsqu’on parlait des alertes précoces par exemple, ce n’est plus un problème dans les pays développés parce que le système est mieux développé. Mais nous autres n’en avons pas nécessairement et, quand bien même ça existe, ce n’est pas suffisamment diffusé, ou alors les personnes cibles ne sont pas facilement atteintes. Ça peut être dû à notre niveau de technologie.
Lorsqu’on parle du déplacement de ces populations, nous nous sommes posé la question de savoir pourquoi elles vivent dans des zones dangereuses. C’est parce qu’elles n’ont pas le choix. Ce sont des zones facilement accessibles pour elles. Et parfois l’État les laisse là parce qu’il n’y a pas assez de moyens de les recaser. Les déplacer d’un lieu à un autre, demande de mettre en place des plans de recasement et des plans d’urgence. Ces systèmes n’existent pas à cause de la précarité.
Comment comprendre l’échec des politiques publiques en la matière, qui pourtant semblent parfois bien élaborées ?
Je ne parlerais pas d’échecs. Je parlerais des difficultés. Car il y a un problème d’implémentation. Les politiques sont mises en œuvre et il y a des lignes qui sont définies. Le problème se situe au niveau de cette implémentation. Ça nous ramène au niveau économique. Si je prends le cas du Cameroun, nous sommes souvent amenés à choisir entre la stabilité économique et l’intégrité territoriale. On va par exemple investir pour la stabilité dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, la lutte contre Boko Haram, et on va mettre les changements climatiques un peu en retrait. Parfois, il faut faire ces équilibres-là, qu’on le veuille ou pas. Notons également que les dépenses liées à la gestion de ces crises ne sont pas financièrement rentables. Or, nos pays ont besoin de dépenser et d’avoir une rentabilité financière. Ce sont des enjeux à ne pas perdre de vue.
Peut-on également questionner les mentalités ?
Bien sûr ! Mais sous cet angle-là, on peut paraître un pessimiste. Alors, il faut davantage questionner la conscience des gens relativement à ce qui est en train de se passer. On a l’impression que certains n’ont pas conscience que si je jette mon ordure, ça crée autre chose. Aujourd’hui, on constate la recrudescence des maladies comme le choléra qui est dû à l’insalubrité et la pollution de l’eau. Il y a des gens qui défèquent dans des torrents faute parfois de moyens de se construire des latrines normales, mais oubliant en retour qu’il y a toute une chaîne d’eau qui va être utilisée par d’autres personnes.
Oui, il y a un problème de mentalités d’une part, mais il y a également lieu d’amener les gens à prendre conscience de la menace des changements climatiques.
Concrètement, quelle peut être la contribution de la jeunesse dans la transformation de nos villes ?
Les jeunes peuvent contribuer à plusieurs niveaux. Qu’il s’agisse par exemple, de construire des jardins verts, faire des plaidoyers pour en vue de la création d’un système de gestion des eaux pluviales, etc. Les peuvent également mettre sur pied des systèmes d’alertes précoces et ils peuvent aussi faire de la recherche.
Les pouvoirs publics devraient accompagner l’action des jeunes, sinon on ne pourra pas la matérialiser. Il faut leur donner la possibilité de pouvoir s’étendre
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