Joseph Kamdem est aujourd’hui élève bien intégré au cours préparatoire à l’Ecole publique de Nkolfoulou. Etablissement qu’il fréquente depuis l’année scolaire 2021-2022. Son évolution dans cette école non-classée comme inclusive est plutôt jugée satisfaisante, lui qui est atteint d’une paralysie cérébrale depuis la naissance. « Il n’est pas encore capable de parler de façon distincte, mais nous avons une manière de l’évaluer et à chaque fois, il est capable de reconnaître la bonne réponse », renseigne Oscar Belibi, directeur de l’école publique de Nkolfoulou, groupe 1.
Cette amélioration, Joseph Kamdem la doit à l’épanouissement dont il est entouré depuis son inscription dans cette école. En effet, le jeune Kamdem arrive l’école publique de Nkolfoulou au lendemain de son exclusion d’une école où il avait été préalablement inscrit par ses parents. Cette épreuve difficile ne le laissera pas indifférent, encore moins sa famille. « Je l’ai reçu dans des conditions très précaires, et sa mère était en larmes. Il se considérait plus comme un malade mais, je lui ai fait comprendre qu’il n’était pas malade, et qu’il était un élève comme les autres », indique Oscar Belibi.
A ce jour, l’on planifie déjà la suite de sa formation. « Comme il peut déjà identifier le savoir qu’il a reçu, il est désormais question de l’emmener à cultiver l’appréhension. Il faudra qu’il puisse lui-même écrire ce qu’il pense », explique Oscar Belibi. Toutefois, à défaut d’écrire à la main, le top management de son établissement souhaite l’emmener tout au moins à utiliser l’outil informatique en posant les doigts de façon distincte sur les différentes touches. Pour cela, « j’ai acheté des petites boules en caoutchouc qu’il va être entrainé à serrer progressivement», rassure le directeur de son école.
Une vie tumultueuse
Faut-il le rappeler, la vie de Joseph Kamdem n’a pas été toujours rose. Les difficultés, il les affronte depuis la naissance. « Je mets cet enfant au monde le 1er mai 2010. Un enfant qui est totalement flasque, fatigué, qui n’a pas de motricité et qui est amorphe. À un moment donné, il devient raide », se souvient Flore Kamdem Ngassa, sa maman. Le bébé qu’il était à l’époque est aussitôt transféré en néonatalogie dans un hôpital de la place où le personnel de santé proposera à sa mère d’écourter sa vie. « Le personnel soignant m’avait proposé de le laisser mourir parce qu’il allait être un fardeau que je porterais toute ma vie durant, et que j’étais trop jeune pour supporter cela. Je leur ai dit que j’allais l’accompagner toute ma vie, qu’importe le prix à payer », déclare sa maman. Ce n’est que grâce à ce refus de sa mère que Joseph Kamdem aura la vie sauve.
Plus tard, lorsqu’il a cinq ans, il est inscrit dans une école non inclusive proche du domicile de ses parents, mais il n’y sera pas accepté. « L’école inclusive où je l’ai inscrit après était très loin de la maison. Cela était très coûteux par rapport à mes moyens et il a été obligé d’arrêter juste un an après. On a parcouru de nombreuses écoles avec lui, mais à chaque fois on le refoulait. Il n’a pas eu la chance d’avoir des personnes qui pouvaient le comprendre et l’accompagner », déclare sa maman, pour le déplorer.
Dans cette course à la recherche d’une école pour l’encadrement de sa progéniture, Flore Kamdem connaitra sa pire expérience de l’exclusion sociale en 2021. « En plus des 200 000 Fcfa qu’on me demandait de verser en termes de scolarité, la maîtresse de sa nouvelle école m’imposait de lui payer 25 000 Fcfa de gratification tous les mois », déclare sa maman. « Nous avons négocié et elle a accepté 10 000 Fcfa. Mais dans la nuit, elle m’a passé un coup de fil pour revenir sur sa décision. Quand j’ai refusé de payer 25 000 Fcfa, ils ont chassé mon enfant de l’école. J’ignore pourquoi le directeur de l’école qui avait pourtant tout accepté a plié aux caprices de la maîtresse. Joseph en a été très affecté psychologiquement. Si nous sommes debout aujourd’hui, c’est grâce à Dieu », poursuit Flore Kamdem qui ne tarit pas d’éloges envers l’école publique de Nkolfoulou, la seule qui a accepté de recevoir et d’encadrer son fils en dépit de sa déficience.
Plus le temps passe, plus sa mère initie de mesures pour améliorer ses conditions de vie. Elle est d’ailleurs surprise des résultats déjà atteints. « Ce que nous avons aujourd’hui en termes de résultat est loin de ce que nous avions imaginé. On m’avait dit qu’il n’allait jamais entendre, mais c’est le contraire aujourd’hui. Il comprend tout ce qu’on lui dit et essaie de participer à sa façon aux tâches ménagères. C’est un enfant qui ne marche pas, mais qui s’enroule au sol comme il peut le soir et va tirer le rideau pour recouvrir la porte, parce que c’est ce qu’on lui a appris. Il y a une grande évolution », se satisfait sa mère. Au regard des difficultés traversées avec enfant, Flore Kamdem apporte désormais son appui à tous les parents d’enfants infirmes moteurs cérébraux. Elle est à juste titre présidente aujourd’hui de l’Association de soutien aux enfants infirmes moteurs cérébraux (Aseimc).
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